Au cours des dernières années, j’ai modifié en profondeur mes habitudes que ce soit alimentaires, physiques et même ma façon de dormir. La véritable révolution pour moi fut le moment où j’ai décidé de retrouver un sommeil de qualité, à l’instar de celui de mes ancêtres et de me passer d’oreiller… définitivement.
Dormir sans oreiller ?
Cela fait bientôt 7 ans que je dors sans oreiller et sur un matelas ayant une épaisseur de 20 cm mais cela fait 10 ans que j’ai progressivement diminué leur utilisation. Cela peut paraitre surprenant mais je serai aujourd’hui incapable de dormir sur une literie dite « classique ». Mon corps s’est en effet habitué à dormir dans des conditions très spécifiques, réellement physiologiques et adaptées à notre morphologie.
Pour autant, on me demande souvent s’il y a une façon idéale et un support optimal pour dormir ? Je répond généralement qu’il n’existe aucune position idéale pour dormir de la même façon qu’il n’existe aucune position idéale pour bouger et évoluer au cours de la journée. Les humains dorment sur des surfaces naturelles qui varient constamment, se courbant et se déformant, en ouvrant leur corps pour la régulation de la chaleur ou en se refermant pour éviter les insectes, depuis l’aube de l’humanité, à l’instar de tout autre animal.
Dormir avec un oreiller : le poids des habitudes
Cela étant dit, il n’y a rien de moins confortable que de dormir à même le sol lorsque votre corps n’y est pas habitué. Ce qui m’amène à me pencher sur le terme « habitué ».
L’entraînement physique est quelque chose que l’on a tendance à associer au fitness ou à l’athlétisme. Supposons que vous couriez quelques kilomètres par jour, en augmentant lentement votre kilométrage jusqu’à ce que votre corps s’habitue à courir cinq, puis dix kilomètres. Dans ce cas, le terme « habitué » signifie que vous avez donné à vos tissus et à votre physiologie le temps nécessaire pour s’adapter. Dire « j’ai l’habitude » signifie en fait « je me suis entraîné pour cela ». Comme je le rapelle régulièrement, votre corps s’adapte ou dépérit. SI vous souhaitez qu’il s’adapte, à l’instar de tout organisme vivant, il faut lui laisser du temps.
Un personne qui ne lève jamais de poids, n’a jamais donné à son dos l’occasion de se muscler et de s’habituer aux charges. Le jour ou elle soulève un carton un peu lourd, elle se blesse au dos. C’est exactement la même chose pour un dos non habitué à sommeil porté sur un support dur, tel que le sol.
Je viens de rentrer de quatre jours de bivouac en forêt. Il y a dix ans, quatre jours de sommeil sur le sol ou même sur un tapis m’auraient laissé avec un raideur au cou qui aurait duré quelques semaines et quelques séances d’ostéopathie. Pourquoi ? Parce que je n’y étais pas « habitué », parce que mes tissus étaient familiarisés avec un matelas mou, un oreiller moelleux… bref, tout l’inverse de ce qui a constitué notre couchage pendant des centaines de milliers d’années… C’est exactement pour cette raison que courir 5 kilomètres de plus que votre footing habituel vous fera aussi mal que dormir à même le sol 2 nuits par an pendant vos vacances d’été au camping. Vous dépassez simplement les limites de la résistance de vos tissus et créez une charge supérieure à celle à laquelle votre corps est habitué.
L’entrainement progressif
Je défend ce concept dans l’approche d’entrainement progressif. L’idée est l’entraînement progressif est de repousser très progressivement les limites actuelle de votre corps. Dormir sur le sol, soulever une barre olympique ou un kettlebell, courir 5 sprints, jeûner 20h, retenir votre respiration 3 mn… tout ces éléments constituent un stress pour votre organisme. Mais celui-ci possède une formidable capacité d’adaptation dès que l’on quitte, de façon brève mais fréquente (quotidienne) et intense, notre zone de confort. Non pas que le confort soit un mauvaise chose en soi mais trop de confort est réellement anti-physiologique.
Le confort de l’oreiller nous a été donné à la naissance parce que nous avons été convaincu par nos parents et nos arrières grands parents que l’oreiller était indispensable à un bon sommeil. Historiquement, il y a 9000 ans, alors que le matelas n’existait pas, l’oreiller n’était pas destiné à avoir un confort de maintient mais…à nous protéger des insectes pendant le sommeil. Ce même oreiller, accessoire de prestige réservé aux plus grands, n’avait aucun rôle physiologique mais avant tout celui de surélever et protéger la tête. Durant l’antiquité, en Egypte, Grèce, à Rome, En Chine ou en Europe, les oreillers, alors confectionnés en pierre, bois, paille, roseau… étaient purement et simplement réservés à l’élite pour le prestige de la tête, organe sacré parmi les sacrés, ou pour poser les livres sacrés (comme chez les musulmans).
Dormir avec un oreiller : l’illusion du confort
Mais aujourd’hui, sa démocratisation a du passer par la mise en lumière d’un pseudo rôle. Celui de garantir un sommeil confortable à tous, toute les nuits, toute la vie. Jour après jour, notre corps s’habitue à récupérer sur un support moelleux, chaud, doux… Pour autant, le confort du lit ne garantit pas une bonne récupération, loin de là. Le cas échéant, il n’y aurait pas d’insomniaques. Et puis, un lit confortable n’a jamais empêché les courbatures d’un lendemain de compétition ou d’entrainement…Ce serait même plutôt l’inverse…
La pratique de l’utilisation de l’oreiller à la main est similaire à celle de l’utilisation des chaussures. Nous commençons à utiliser ces articles parce que tout le monde le fait, puis nous nous y habituons physiquement et physiologiquement (d’un point de vue cellulaire). L’utilisation du lit et de l’oreiller a modifié la forme du corps, nous rendant aptes dormir sur des oreillers et des matelas moelleux. Mais est-ce vraiment un service que nous nous rendons ? La détente excessive pendant la nuit, l’alignement parfait de la colonne vertébrale, l’immobilité prolongée dans une position confortable entraîne inévitablement des tensions à d’autres endroits du corps. Votre corps est fait pour bouger, même pendant la nuit.
Ce mouvement est indispensable :
- Au bon déroulement des cycles du sommeil
- A votre digestion
- A la reconstruction neuronale (vigilance nocturne)
- A la récupération musculaire et osseuse
- Au maintient d’une mobilité optimale en journée
- A la gestion de vos hormones (de l’insuline en particulier)
- A l’amplitude et la fréquence de votre respiration (apnée du sommeil)
- A la gestion de votre métabolisme basal
Asseyez à même le sol pendant que vous travaillez la journée. Regardez combien de temps vous tenez avant de changer de position (assis, a genoux, en squat…). Ce mécanisme naturel est identique pendant la nuit. Une analyse complète de tout les cycles du sommeil d’une personne en bonne santé montre que c’est pendant les phases de sommeil « léger » que la personne bouge le plus afin de trouver une position confortable et adaptée à la prochaine de sommeil « profond ». Mais si votre corps bouge peu la nuit, lui imposer un sol dur et sans support du cou revient à stopper totalement les cycles de sommeil profond.
La progressivité
Du coup, se débarrasser de l’oreiller est très semblable à se débarrasser de ses chaussures. Passez d’une chaussure de course classique, avec un support de talon énorme à une chaussure minimaliste a drop 0, et vous verrez les courbatures / blessures en fin de journée….
Oui, vous pouvez jeter ces deux objets immédiatement, mais ce faisant, vous risquez donc de charger des tissus sous-utilisés au point de les léser (comme le montre le fait de dormir à même le sol). C’est exactement pourquoi il vaut mieux envisager une approche lente et systématique pour changer votre façon de dormir. Le sommeil sans oreiller nécessite des muscles du cou et des épaules détendus mais aussi des muscles plus développés sur cette partie du corps. Dormir sans oreiller nécessite moins d’hyperkyphose (la courbure excessive du haut du dos) et plus de mobilité. Vous pouvez travailler sur la mobilité de la tête et du cou pendant la journée afin de pouvoir les solliciter la nuit. Mais SURTOUT, prenez votre temps. Fixer un objectif de 1 à 2 ans avant de vous passer d’oreiller me semble raisonnable.
Il m’a fallu environ 3 ans pour me passer complètement d’oreiller, mais j’ai fonctionné de façon ultra progressive.
D’un oreiller épais et confortable, je suis passé à un oreille plus fin, puis à un oreiller encore plus fin, puis à une serviette pliée, puis à un tee-shirt plié, puis.. à rien du tout. J’ai dormi 4 heures sans rien puis 5 puis 8… Mes tissus se sont épaissis progressivement, ma densité osseuse à augmenté au niveau du cou et les courbatures du matin en bas du dos, en haut et au cou ont totalement disparues.
Dormir sans oreiller nous rend-il plus résilient ?
J’ai acquis un avantage décisif et une résilience plus élevée dans ma gestion du sommeil quelque soit la circonstance dans laquelle je dors.
Dormir sous la tente, dans un hamac, sur un banc, chez des amis, en bivouac ou n’importe où ne me dérange plus. Je n’ai pas besoin d’oreiller ni de matelas. Je dispose d’un tonus exceptionnel dès le matin. Tout comme le port constant de chaussures ou le fait de marcher constamment sur terrain plat et invariable affaiblissent énormément la force et le maintient de vos pieds, le fait de toujours dormir sur quelque chose de plat et de moelleux altère invariablement la mobilité et la force de votre corps dans son ensemble. Bouger pendant son sommeil sur un support dur et laisser son corps trouver une position confortable est naturel et physiologique. Votre corps n’est absolument pas fait pour rester immobile la nuit, et encore moins pour bénéficier d’un confort exceptionnel tout les jours pendant 7 à 10h.
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