L’entrainement fractionné à haute intensité (high-intensity interval training ou HIIT) est une méthode d’entrainement qui en a laissé plus d’un sur le carreau, généralement dans une marre de sueur avec le sentiment de s’être donné à fond (ce qui est souvent le cas)…Elle est, pour la majorité des sportifs, l’une des composantes essentielles de l’endurance et de la performance avec pour socle, une modification importante de la composition corporelle et des marqueurs biologiques.
Ce qu’il faut savoir
Petite histoire du HIIT
Ce protocole, pour ceux qui ne le connaisse pas, fut imaginé, il y a quelques années avec le Dr. Izumi Tabata. Celui-ci travailla, dans les années 90, avec Irisawa Koichi, le coach de l’équipe olympique du Japon de patinage de vitesse et développa un protocole d’entrainement mêlant une nombre maximum de sprints suivi de brèves période de repos. Cette approche permis aux athlètes d’améliorer et de maintenir un niveau de performance extrêmement élevé. Du coup, le Dr Tabata voulu tester cette méthode avec des athlètes de niveaux différents sur différents type de pratiques.
Dans l’étude qu’il réalisa en 1996
, il examina 2 groupes d’athlètes amateurs d’un vingtaine d’années.
- Le premier groupe pédala sur un Vélo Elliptique pendant 60 minutes à une intensité modérée (70% de leur VO2 Max), soit à peu près l’intensité pour une bonne grosse session de jogging (Rythme d’entrainement qu’on appelle Entrainement LSD ou Long Slow Distance).
- Le second groupe pédala pendant 20 secondes à effort maximum suivi de 10 secondes de repos, le tout pendant 4 minutes (sur la base de 7 ou 8 sets au total). Chaque sprint étant considéré comme un effort maximal, si l’un des athlètes n’atteignait pas 8 sets, il s’arrêtait à 7.
Les 2 groupes s’entrainèrent 5 jours par semaine, 5 heures par semaine au total pendant 6 semaines.
Ce qui est intéressant sur le graphique de droite est d’analyser les progrès de la performance anaérobique. On s’aperçoit que les athlètes ayant suivi le protocole Tabata (Groupe 2 / Ligne rouge) améliorent nettement celle-ci, ce qui ne fut pas le cas du Groupe 1. Ce résultat semble normal dans le sens ou les sprints utilisent davantage de ressources anaérobiques.
Sur le graphique de gauche, qui mesure l’utilisation de l’oxygène par l’organisme et donc l’efficience globale lors d’une activité aérobique (plus celle-ci est élevée, plus le processus aérobique est efficace), on peut constater les 2 groupes ont su exploiter l’oxygène de façon efficiente.
La conclusion surprenante de l’étude est que les personnes ayant réalisé le protocole Tabata ont obtenu les mêmes résultats anaérobiques que ceux ayant suivi un entrainement LSD (Groupe 1). Ainsi, un entrainement de 4 minutes à intensité maximale donne les mêmes bénéfices anaérobique que entrainement modéré de 60 minutes. Ce bénéfice remarquable proviendrait d’une spécificité physiologique de l’homme permettant à notre organisme de déployer un maximum d’énergie et d’hormones telles l’adrénaline et donc de cortisol, d’améliorer l’utilisation de l’oxygène disponible et celle de notre processus anaérobique pour faire face à un danger immédiat, ce qu’on appelle plus communément le « fight-or-flight response« . Ce phénomène permet une meilleure résilience métabolique, une optimisation de la mitochondrie cellulaire (Mitophagie) et donc une amélioration des performances globales. Par ailleurs, cette technique semble favoriser la mémoire musculaire
La révolution HIIT est en marche…
Le problème avec le HIIT de Tabata
Le problème avec le protocole Tabata, c’est l’utilisation que les sportifs en font au travers d’exercices au poids de corps notamment. Il se trouve que, pensant optimiser la consommation de calories et la combustion des graisses (ce qui est une hérésie sans être « adapté à la combustion des graisses« ), les gens ne font pas 7 sets sur 4 minutes mais plutôt sur 20 voire 60 minutes ! On peut notamment le voir chez certains pratiquant de Cross-fit n’ayant pas été sensibilisés à la Dose Minimale Efficace d’effort (ou MED) Quelle en est la conséquence de cette sur-utilisation du protocole ?
Les périodes prolongées de « fight-or-flight response » et donc de stress métabolique entraînent, sur le long terme :
- Une dégradation de la mitochondrie
- de l’immunité
- de la capacité de récupération
- des processus digestifs
- une fatigue chronique…
- …et donc un risque de blessure beaucoup plus élevé.
Le HIIT est court autant en phase d’effort que de repos et doit le rester pour apporter des résultats, sur la durée.
Les intervalles de Burgomaster et Gibala
Kirsten Burgomaster et Martin Gibala ont modifié le protocole Tabata
en allongeant les périodes d’effort à 30 secondes mais aussi les périodes de repos à 4 minutes. Ils ont trouvé les mêmes bénéfices aérobiques et anaérobiques que que le protocole initial de Tabata. D’autres ont trouvé des résultats concluants sur la perte de graisse.
Pour quelles raisons ?
Augmenter le repos à 4 minutes permet une meilleur utilisation de la phosphocreatine et donc de la regenération d’ATP dans les muscles. Votre corps récupère plus vite et offre une meilleure performance dans l’effort maximal. Mais il a aussi été démontré que les intervalles à haute intensité du Burgomaster et Gibala permettent d’activer une kinase spécifique responsable d’une meilleur efficience métabolique. L’AMPK (ou AMP-activated protein kinase) favorise la mitochondrie ainsi que les réactions métaboliques génératrices d’ATP (oxydation des acides gras et glycolyse) et réduit les réactions biochimiques consommatrices d’ATP (comme la lipogenèse).
En gros, votre équilibre énergétique dépend d’un ratio, le ratio entre adénosine triphosphate (ATP) / Adénosine diphosphate (ADP) qui doit être de 10 pour 1. Le fait que le ratio ATP/ADP soit constamment maintenu dans des limites étroites indique que l’énergie consommée des cellules est proche de l’énergie créée. Or, il n’y a aucune raison biophysique pour que le ratio ATP/ADP soit stable au cours du temps puisque les besoins énergétiques cellulaires varient du très court terme au long terme, alternant des phases de stockage énergétique (par l’utilisation des glucides et des lipides) et des phases d’utilisation de l’énergie stockée. Lorsque vous videz votre réserve d’ATP, vous créez de l’ADP puis de l’AMP (vous utilisez une molécule de phospate à chaque itération pour récupérer de l’énergie) et donc déstabilisez le ratio énergétique. Notre corps réagit en activant un « sensor métabolique » nommé AMPK et en augmentant l’activité mitochondriale (AMPK stimule l’autophagie) pour faire face à la demande extrême d’énergie que l’AMP ne peut plus produire.
ATP -> ADP + energie -> AMP + energie
Par ailleur, AMPK possède une capacité forte a prendre pour cible le métabolisme des graisses. En inactivant l’acétyl-CoA carboxylase (ACC), l’AMPK stimule l’oxydation des lipides dans les tissus et donc…réduit leur stockage. Vous perdez du gras. Bien que l’AMPK agisse au niveau cellulaire, cette enzyme participe également à la régulation de la prise alimentaire et de la dépense énergétique de l’organisme entier en intervenant dans la transmission des effets d’hormones ou d’adipokines comme la leptine et l’adiponectine. C’est pour cette raison que les scientifiques étudient le fonctionnement de l’AMPK dans le cadre du jeûne intermittent ou du régime cétogène. Le bon conseil du jour ? Réalisez votre séance de HIIT pendant votre jeûne intermittent…. Vous activerez la voie AMPK et boosterez massivement la combustion de graisses.
Un sprint de 30 secondes va donc augmenter votre activité mitochondriale et lorsque vous avez épuisé votre AMP, vous ne pouvez plus produire d’énergie par l’ajout d’une molécule de phosphate. Lorsque vous vous entrainez trop longtemps à haute intensité, vous avez épuisez votre stock d’AMP, votre corps crée de l’ammoniac, toxique, à partir de la molécule d’AMP. Le protocole de Burgomaster et Gibala est intéressant car il permet de brûler efficacement de la graisse et d’activer l’utilisation de votre ATP. Mais pour certains une phase d’effort de 30 secondes ou un nombre trop important de reps en Gibala vident le stock d’énergie et baisse la performance globale. Ce protocole va sur-utiliser les molécules d’Adénosine pendant l’effort de 30 secondes. Raccourcir les temps d’effort max permet donc à votre corps de récupérer plus vite et produire moins d’acide lactique et autres « déchets musculaires ».
L’entrainement à intervalles répétés à haute intensité (HIRT)
On comprend donc à présent que ce qui compte, ce n’est pas le nombre d’intervalles réalisés mais le repos entre chaque intervalle. Dans le HIIT, le temps de repos entre chaque intervalle ne permet une récupération complète ce qui entraine une récupération insuffisante et une baisse de la performance sur les intervalles suivants.
C’est là que le HIRT intervient. Au lieu d’épuiser l’organisme à chaque intervalle, là, le but du jeu est de réaliser un nouvel intervalle à la même intensité et avec le même niveau de performance (reps, vitesse, distance…). La clé en HIRT est de maximiser le temps de repos pour diminuer le stress impactant la durée de la performance. Sur un sprint typiquement, l’objectif est de réaliser exactement le même sprint à chaque intervalle (durée ou distance) sans épuiser l’organisme grâce à un temps de repos suffisant.
Pavel Tsatsouline, qui à notamment popularisé l’usage du kettlebell, à également travaillé sur ces logiques d’intervalles optimisés en modifiant les temps de repos et d’exercice pour maximiser les effets métaboliques liés à l’intensité. Dans la plupart des protocoles testés avec Kettlebell, il proposait des sets de 10 secondes ou moins offrant une récupération plus importante, typiquement un set de 10 secondes à chaque minute. Il s’est aperçu que ce rythme, dans la plupart des cas permettait d’enchainer les set au maximum du potentiel sans perte de performance, une augmentation massive de l’énergie déployée, une modification de la composition corporelle et des capacités anaérobiques.
Ce que j’en pense
L’entrainement par intervalles à haute intensité est un merveilleux outil pour renforcer durablement votre métabolisme, améliorer vos fonction vitales, cérébrales et hormonales. Pour autant, le HIRT semble avoir des bénéfices plus importants que le HIIT du fait d’une amélioration de la performance globale et de l’explosivité à chaque intervalle.
Le HIIT et le HIRT engendre de profondes modifications métaboliques et des améliorations au niveau de votre pression artérielle, de votre métabolisme de base, de votre fréquence cardiaque au repos et une croissance musculaire conjointement à une augmentation et de votre taux de testostérone. Il stimule votre système en profondeur.
L’entrainement HIIT est même efficace sur des personnes ayant une sensibilité déficiente à l’insuline, tels les diabétiques.
Nous avons tous en nous ce potentiel, issu de millions d’années d’évolution et initialement destiné à optimiser nos ressources énergétiques à un moment où le danger nous demandait soit de fuir, soit de combattre (fight-or-flight response). Je considère donc qu’il est important de l’inclure dans votre plan d’entrainement, 1 fois par semaine.
Quelque soit le set envisagé (Kettlebell, Calistehnics, sprints, natation, rameur ou vélo par exemple), quand vous ne pouvez plus le réaliser, c’est que vous avez terminé la session. Il doit être réalisé à pleine intensité pendant 5 à 15 secondes. Des intervalles plus longs font baisser la performance et demandent des phases de repos plus importantes. Souvenez-vous, gardez des intervalles courts pour pouvoir réaliser plus de set avec un max d’intensité.
Les phases de repos sont aussi importantes que les phases d’effort. Pour 10 secondes d’effort, 45 secondes de repos sont nécessaires. C’est pourquoi le HIRT peut se faire au tempo minute à minute. Vous réalisez un sprint max de 10 secondes chaque minute + 5 secondes d’accélération et 3 secondes de décélération avec donc 42 secondes de récupération.
Par ailleurs si les sprints représente un risque de blessure trop important, je vous invite à privilégier les exercices à haute intensité moins traumatisants comme la natation, le vélo ou la natation.
Alors n’attendez plus, passez au HIRT !